Comment les community health workers en Belgique comblent le fossé en matière de soins de santé

Construire une société en bonne santé, cela demande un travail collectif. Parce que si les soins de santé ne sont pas accessibles à tous, alors ceux qui vivent en situation de vulnérabilité sont les grands perdants.

Les CHW sont reconnus par les habitants et utilisent leur expérience de vie pour rapprocher les soins de la population.

En Belgique, les soins de santé sont facilement accessibles à de nombreux résidents. Néanmoins, il existe des inégalités sociales qui rendent l’accès aux soins plus difficile pour les personnes en situation de précarité. Les personnes ayant un faible niveau d’éducation, un faible revenu et/ou celles qui vivent dans des conditions de vulnérabilité sociale ne trouvent pas toujours le chemin vers nos services de santé. Elles sont souvent décrites comme étant “difficiles à atteindre”. De leur point de vue, ce sont précisément les services de santé qui sont difficiles à atteindre.

Le community health worker en tant que figure de liaison

Certains pays déploient les community health workers (CHW) pour renforcer les soins de santé et les rendre plus accessibles. Les CHW sont ancrés dans les quartiers où ils travaillent, sont reconnus par leurs habitants et utilisent leur expérience de vie pour rapprocher les soins de la population.

Dans notre pays aussi, un soutien supplémentaire est nécessaire pour les personnes en situation de vulnérabilité afin d’améliorer leur accès aux soins. C’est pourquoi, en 2021, l’Institut national d’assurance maladie-invalidité (INAMI) a missionné les mutualités de recruter 50 CHW. Répartis dans 10 villes de notre pays, elles ont été chargées de contribuer à lever les obstacles à l’accès aux soins dans les quartiers vulnérables.

Les CHW, appelés aussi facilitateurs en santé ou agent de santé communautaire, établissent des liens entre les communautés et les services de soins de santé. Ils s’engagent chaque jour à répondre aux besoins de santé non satisfaits et aux inégalités en matière de santé. Chaque personne appartenant à la population cible a des besoins individuels en matière de soins de santé et se heurte à des obstacles spécifiques. Les CHW apportent un soutien sur mesure. Ils adaptent leur approche aux circonstances uniques des groupes en situation de vulnérabilités. La force des CHW réside dans leur approche de proximité, leur capacité à prendre leur temps et à établir une relation de confiance. Leur flexibilité à suivre et à soutenir les individus tout au long du continuum d’accès aux soins, lorsque cela est nécessaire, est un autre point fort. Cela commence par la reconnaissance par la personne d’un besoin de santé, en passant par la capacité à trouver les bons soins, à utiliser ces soins de manière appropriée et à voir le besoin de santé réel satisfait par les services de santé. En outre, les community health workers ont également une fonction de signalisation qui leur permet d’identifier et de transmettre les obstacles structurels. Ainsi, les CHW contribuent à améliorer l’efficacité et les performances du système de santé.

Het projecteam van de Community Health Workers, samengesteld vanuit de ziekenfondsen

Encadrer une équipe forte

Ann Hendriks est l’une des coachs qui soutient les CHW à relever les défis auxquels ils sont confrontés. Le rôle principal des CHW est de créer des liens entre les personnes vivant dans des conditions de vulnérabilités et les organismes de soins et d’aide sociale. Ils aident également les professionnels de la santé et de l’aide sociale à mieux comprendre les sensibilités culturelles et soulignent l’importance de l’accès aux soins pour les populations en situation de vulnérabilités « mal desservies » auprès de différentes organisations.

“Le rôle d’un coach est d’assurer une équipe solide de community health workers et de garantir au mieux la continuité des services au sein de la communauté. Je supervise les CHW sur le terrain et leur apporte un soutien émotionnel. Je les aide également à respecter les limites du rôle de CHW.” explique Ann.

“Ma présence sur le terrain les empêche aussi d’assumer des tâches qui ne sont pas de leur ressort.”

Structure générale

Un bon cadre de soutien est essentiel à un bon fonctionnement. En Belgique, ce cadre se compose d’une structure de gouvernance fédérale globale dirigée par le coordinateur fédéral avec un rôle important pour les trois coordinateurs régionaux dans les trois régions du pays. Cette structure garantit que tous les community health workers reçoivent le soutien, la rémunération et le matériel nécessaires à l’accomplissement de leurs tâches au niveau local.

En outre, le programme belge CHW se concentre fortement sur l’adaptation et l’ancrage local, avec des partenariats spécifiques à chaque quartier. Le rôle des coachs est crucial à cet égard. Ils adaptent les actions au contexte local.

Le programme belge CHW doit son succès à deux facteurs : la structure fédérale organisée par les mutualités et les community health workers qui adaptent pleinement leurs actions aux réalités locales.

Selon Ann, il existe un fossé entre la façon dont les personnes en situation de vulnérabilité perçoivent les soins et la façon dont le système de santé les perçoit. C’est ce fossé que les coachs et les community health workers contribuent à combler.

“Nous nous attaquons aux problèmes structurels et à la mauvaise communication “, explique-t-elle.

“Notre ambition est d’aller au-delà de la simple fourniture de solutions à court terme. Il s’agit de créer un impact à long terme.

“Il s’agit de créer un impact durable, et pas seulement un soutien à court terme.” Ann

Impact de la migration

La Belgique bénéficie d’une situation géographique avantageuse et d’une qualité de vie élevée. Elle attire donc des personnes du monde entier. Environ 13 % de la population belge est née à l’étranger. La grande majorité vient d’autres pays européens, comme la France et les Pays-Bas. De nombreuses personnes sont également d’origine africaine et turque.

La migration a connu une tendance à la hausse au cours de la dernière décennie. Certains fuient des troubles civils ou politiques De nombreuses personnes viennent de pays francophones, comme le Rwanda, mais d’autres n’avaient que peu de choses en commun avec la culture ou la langue belge avant d’arriver dans le pays.

“Il est essentiel de comprendre le parcours traumatique des familles qui arrivent de pays ravagés par la guerre”, explique Ann.

Fracture numérique

Deborah Alcime est venue en Belgique pour faire un master en santé publique. En tant que community health worker, elle s’adresse à une grande variété de personnes à Anderlecht : les jeunes, les personnes âgées, les personnes sans-abris, les personnes sans-papiers.

Dans le cadre de son travail, elle est confrontée aux nombreuses difficultés que rencontre la population vieillissante.

“Pour les personnes âgées, la “fracture numérique” et les problèmes de mobilité sont des défis majeurs”, explique Deborah. “Souvent, elles ne sont pas familières avec les systèmes électroniques de prise de rendez-vous et se déplacer peut également être un problème, surtout si elles sont isolées. “

L’équipe de Bruxelles a adapté son approche aux besoins spécifiques de la communauté qu’elle aide. Cela implique, par exemple, d’être présent dans les lieux où les gens se rassemblent et de travailler avec des partenaires qui lui permettent d’offrir un accompagnement en dehors des heures de travail normales.

Deborah rencontre les personnes dans divers endroits, dont un restaurant social. Il s’agit d’un lieu de rencontres intergénérationnelles. Qu’il s’agisse de jouer aux cartes de danser ou manger ensemble, Deborah décrit ce restaurant comme un service social pour la communauté.

“Le projet a fait la différence pour de nombreuses personnes âgées en les informant et en les aidant à exercer leurs droits et à répondre à leurs besoins”, a déclaré Deborah. “La communauté est moins inquiète parce qu’elle sait qu’elle peut trouver de l’aide quand elle en a besoin ».

Les community health workers font tomber les barrières linguistiques au sein de la communauté et encouragent les gens à faire de la santé une priorité.

“Pour les personnes qui ont vécu beaucoup de choses, il n’est pas facile de faire confiance.” Nikhat

Un lien de confiance

Nikhat a une expérience de travail auprès des réfugiés à Bruxelles, au sein de l’organisation Médecins sans frontières. Elle décrit son rôle comme celui d’un bâtisseur de ponts, accompagner les réfugiés pour s’orienter dans le système de santé complexe de la Belgique.

“Les personnes qui ont vécu beaucoup de choses ne font pas facilement confiance aux autres”, explique Nikhat. “Il est donc important de leur montrer qu’on et là pour eux, pour leur bien-être, pour améliorer leur situation de vie. Au début, peu de gens connaissaient notre présence à Gand. Nous avons dû expliquer qui nous étions, quel travail nous faisions, pourquoi nous étions là. Mais aujourd’hui, près de trois ans plus tard, ils nous connaissent. »

Nikhat considère que la recherche d’une aide médicale est l’un des plus grands défis pour les personnes sans papiers ; il faut convaincre les gens de se rendre aux rendez-vous et surmonter leur méfiance.

“Parfois, les personnes ne se présentent tout simplement pas au rendez-vous”, explique Nikhat. “Il faut travailler dur pour convaincre les gens de prendre rendez-vous, les guider et les inciter à utiliser les services disponibles”.

Le lien par le vécu

“L’expérience personnelle de Nikhat en tant que réfugiée au Soudan lui permet de mieux comprendre les difficultés auxquelles les réfugiés sont confrontés. Cela renforce sa capacité à établir des liens avec les réfugiés et à les soutenir.

“Enfant, j’ai été réfugiée au Soudan”, raconte Nikhat. “Cela m’a permis de comprendre leurs difficultés et leurs besoins. Mon expérience m’aide à les accompagner. »

L’expérience de Nikhat a également été un catalyseur important pour le lancement du projet Ericare, en collaboration avec Koen Van Praet, psychologue à Gand. Ericare offre un soutien psychologique sous la forme de séances de groupe pour les personnes ayant subi un traumatisme. Les séances de groupe s’avèrent plus efficaces que les séances individuelles. La communauté constituée au cours des séances reste soudée et commence à penser en tant que collectif et non en tant qu’individu. Il existe des sessions distinctes pour les femmes, les hommes et les jeunes. Le groupe cible n’est pas familière avec le concept occidental de “psychologue”, et les séances de groupe l’aident à prendre confiance en elle.

Se comprendre les uns les autres

“L’éclatement des conflits en Irak, en Syrie et en Libye a entraîné un afflux de personnes. Les structures en Belgique avaient besoin de personnel parlant bien l’arabe, car beaucoup de personnes qui arrivaient en Belgique ne parlaient ni le français, ni le néerlandais, ni l’allemand”, raconte Anass Rharib.

Anass a vécu au Maroc pendant son adolescence. Il y a commencé ses études et les a terminées en Belgique, et ce sont l’ensemble de ses connaissances, combinées à sa maîtrise de l’arabe, qui lui ont permis de décrocher son premier emploi en tant qu’animateur interculturel (école des devoirs, cours d’alphabétisation, cours de citoyenneté, accompagnement social, etc.). “Toutes ces compétences m’aident dans mon travail actuel de community health worker”.

Les barrières linguistiques constituent un défi pour les community health workers. “Les interprètes et les médiateurs interculturels sont importants pour surmonter ces barrières”, explique Anass, “en particulier lorsqu’il s’agit de personnes qui ne parlent pas les langues locales”.

“Mais aujourd’hui encore, l’offre d’interprètes reste insuffisante. L’hôpital de Verviers, par exemple, offrait autrefois un éventail de langues, dont le Turc, l’Arabe et les langues d’Europe de l’Est, mais le nombre de langues proposées a été réduit”, explique Anass. “Lorsque nous accompagnons des personnes parlant l’arabe, le russe ou d’autres langues, il nous est de plus en plus difficile de les soutenir en raison du manque d’interprètes.

Soutien en cas de crise

Les efforts quotidiens d’Anass et de l’équipe de Verviers comprennent la prise de rendez-vous et l’accompagnement des personnes vers les centres médicaux. Cela a été particulièrement important au lendemain des inondations de 2021 en Europe, qui ont dévasté une partie de Verviers. Les CHW ont dû s’adapter rapidement aux besoins des personnes qui ont fait appel à leurs services pendant cette crise majeure.

Quarante-trois personnes ont été tuées, de nombreuses personnes ont disparu ou se sont retrouvées sans abri et de nombreux habitants ont dû être évacués de leur domicile.

Face à l’urgence de la situation, les community health workers ont d’abord distribué de la nourriture, rencontré les personnes les plus touchées par les inondations et instauré un climat de confiance. L’équipe a dû surmonter plusieurs obstacles à la fois, tels que l’accessibilité aux soins, la mobilité, l’isolement, la langue et les traumatismes. Cela a nécessité un grand travail de liaison avec d’autres organisations une grande capacité d’adaptation de la part du community health worker.

La santé à nouveau au centre des préoccupations

Anass et ses collègues constatent sur le terrain que les personnes sont souvent plus préoccupées par leur logement, leur travail et la situation financière de leur famille que par leur santé. Il est convaincu qu’il faut insister davantage sur l’importance des soins de santé. En effet, les community health workers travaillent principalement avec des personnes en situation de vulnérabilité qui n’ont pas l’habitude de donner la priorité à leur santé.

“Notre rôle est crucial pour reconnecter la communauté que nous atteignons avec le système de santé afin de pouvoir répondre aux problèmes spécifiques de chaque personne”, conclut Anass.

Dit artikel is een herwerking van het artikel uit de reeks Healthier Together van de WHO Foundation, geproduceerd door BBC StoryWorks. Klik hier voor het originele artikel (enkel beschikbaar in het Engels).

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